L'égalité est au prix de la lutte
Après le 9 février, le 1er mai
Quelques semaines après la victoire de l’initiative xénophobe dite « contre l’immigration de masse », les positions des divers acteurs apparaissent clairement.
Le succès de l’UDC vient confirmer l’existence d’un bloc politique où une importante fraction de la droite bourgeoise a réussi à capter des secteurs du milieu populaire. Contrairement à ce que veulent nous faire croire les forces sociales-libérales, le vote populaire pro-UDC n’est pas un simple coup de colère, l’expression d’une protestation conjoncturelle, le fruit d’une « com » mal gérée.
Il y a un mouvement plus profond dans le positionnement politique d’une partie des classes populaires. Certes, le vote UDC est d’abord un vote bourgeois, autoritaire et xénophobe. Il s’inscrit dans une conception politique très fortement implantée, et depuis longtemps, dans les classes dominantes de ce pays. Ce qui est grave, c’est que ce courant bourgeois se soit transformé en un cadre d’organisation et de référence stable pour une partie des classes populaires.
Cette situation risque encore de s’aggraver avec l’initiative ECOPOP, qui pourrait capter, au profit du vote réactionnaire, une partie des forces de l’écologie politique délibérément ignorantes de la question sociale et de son envergure.
À qui profite l’encadrement ?
Des fractions significatives du salariat et des milieux populaires ont voté pour cette initiative parce que beaucoup de gens sont excédé-e-s par l’arrogance patronale, par le déni des difficultés qui frappent les conditions de vie, de revenu et de salaire. Pour tous ces secteurs, la gauche sociale-libérale, gouvernementaliste et porteuse de la paix du travail, s’avère incapable d’organiser la défense des acquis, de développer un rapport de force, de faire face à l’arrogance bourgeoise. En fait, c’est plus grave. Le social-libéralisme est partie prenante du système de pouvoir. Il vit et se développe à partir de sa capacité à encadrer les classes populaires et à leur barrer la voie d’une mobilisation effective. La gauche sociale-libérale, qu’elle soit politique, syndicale ou associative, constitue un obstacle à l’organisation et à la lutte pour la défense des intérêts de celles et ceux d’en bas. Elle est un élément du gouvernement, un dispositif du système de domination, une partie du pouvoir. Elle constitue un groupe social privilégié qui remplit des fonctions d’encadrement et de contrôle du bloc populaire.
Qui capte ?
Une fraction des milieux populaires a aujourd’hui un positionnement populiste, nationaliste et souverainiste ancré. Cela configure une des dimensions décisives de l’hégémonie bourgeoise, dans ses figures les plus réactionnaires. Une partie du bloc populaire cesse d’avoir une perspective propre de revendication et de libération. Elle s’en remet à l’ordre dominant pour conserver ses acquis ou pour améliorer sa situation. Elle est littéralement dépossédée d’une politique indépendante.
La crise ouverte et l’échec du social-libéralisme relèvent aussi de cette situation. La politique de consensus et de paix du travail, l’intégration dans les structures de pouvoir, le ralliement à ses objectifs, la fermeture progressive des possibles, tout cela a facilité à la constitution d’une droite populaire et populiste, respectueuse de l’ordre dominant. La revendication sociale est remplacée par une proposition politique de « préférence nationale ». La dégradation des conditions de vie et de travail d’une partie du prolétariat, notamment de l’immigration, est acceptée ou même revendiquée comme le prix à payer pour que nationaux/ales et résident-e-s maintiennent leurs acquis.
Comment jouer cette partie ?
Après le 9 février, le front bourgeois se réforme ouvertement. Il veut user de cet événement pour précariser fortement l’immigration. Le durcissement des conditions de séjour, la dégradation des contrats de travail, la limitation ou l’interdiction du regroupement familial, tout cela est porté par des fractions majoritaires du patronat. Les contingents seront utilisés pour accroître la pression et la disciplinarisation de la force de travail immigrée. Puis, très rapidement, l’adaptation à la nouvelle politique migratoire servira de base à la bourgeoisie pour remettre en cause des éléments importants de la politique sociale, accélérer l’attaque contre les retraites, consolider la précarité et renforcer l’organisation patriarcale de la société contre les femmes travailleuses.
Les jeunes en formation sont particulièrement frappé-e-s par cette mise en précarité, par la sous-salarisation, l’exigence de conformisme et de soumission qui frappe la société entière. Les premières attaques, symboliquement, portent sur les échanges culturels et intellectuels, avec à l’ordre du jour un resserrement et une volonté de caporalisation. Les étudiant-e-s étrangers/ères sont visé-e-s par des politiques discriminatoires. La liberté de circulation est remise en cause. Les conditions de travail dans la recherche seront immanquablement attaquées.
L’attaque contre l’immigration sert de point d’appui et de levier dans une nouvelle période d’offensive contre le salariat. Les classes dominantes veulent imposer un surcroît de « déprotection » aux majorités sociales.
La question sociale
Face à tout cela la réponse n’est certainement pas dans le ralliement à la politique menée par le Conseil Fédéral, nuancé par une pression mesurée et respectueuse sur le gouvernement, pour qu’il reconduise une politique de libre-circulation, sans protection et sans garanties. En d’autres termes, il ne peut être question de répondre au 9 février par le prolongement dégradé de la politique qui a précisément permis la victoire de l’initiative xénophobe. Ni d’accepter comme horizon revendicatif le maigre compromis qui accompagnait cette politique et lui donnait son alibi de dialogue social et de consensus.
Les chiches contreparties qui étayaient la politique de libre-circulation vont être attaquées, érodées et dégradées. L’attaque contre l’immigration est immédiatement liée à l’attaque générale contre le salariat et les classes populaires. Un seuil va être franchi. Pour nous défendre, il nous faut d’abord rompre avec la politique de subordination et de compromis avec les forces bourgeoises et le social-libéralisme. Et ce sur tous les terrains, et en premier lieu sur celui de la lutte syndicale.
Seule la question sociale permet effectivement de répondre de manière offensive et claire. La question sociale, les revendications et les aspirations que nous posons en tant que salarié-e-s, en tant que membres du bloc populaire, attaquent l’ordre dominant, nous mettent en position d’égalité les un-e-s par rapport aux autres, permettent la reconnaissance de l’autre comme notre égal-e, ayant et revendiquant les mêmes droits.
4000 vraiment ? Mais combien de fois ? Des tas de fois !
Il nous faut une politique anti-capitaliste. Cela signifie une politique égalitaire, émancipatrice et démocratique. Tout ce qui nous unit doit être défendu sans souci de compromis. Un certain nombre de revendication (ce n’est pas une liste exhaustive) permet de poser la prééminence de la question sociale. Par exemple, celle du salaire minimum à 4’000 CHF. Elle ne se joue pas dans une votation, dans une échéance institutionnelle. Elle doit être saisie comme un élément de lutte stratégique porté par la mobilisation et devant s’incarner autant dans les droits que dans les accords collectifs. Cette revendication doit être au centre de notre activité. Non seulement le 18 mai, pour celles et ceux qui pourront l’approuver dans les urnes, mais surtout au cœur des mobilisations à venir.
Le salaire minimum, 4’000/mois x13 (et non x12), c’est une exigence qui unifie suisse-sse-s et immigré-e-s, travailleurs/euses légaux et travailleurs/euses sans papiers, femmes salariées que l’on veut réduire au salaire d’appoint et à l’infériorité sociale, jeunes que l’on veut enfermer dans les stages, dans des périodes croissantes de sous-salaire car le système refuse de reconnaître leurs qualifications et leurs savoirs. Le salaire minimum c’est aussi la réponse à tous les autres dispositifs de sous-salarisation qui frappent les personnes au chômage, à l’aide sociale, au noir.
La revendication de la légalisation de tous/toutes les salarié-e-s au noir, du maintien du permis de séjour même si l’on est à l’aide sociale, le droit intégral au regroupement familial, voilà des éléments qui se combinent avec le salaire minimum pour définir une véritable politique d’égalité sociale, indépendante des compromis de gouvernement et de paix du travail.
A cela il faut ajouter l’exigence générale d’une démocratie sociale, d’une démocratie du travail qui force la bourgeoisie à reconnaître en droit la liberté d’association, d’expression et d’action des salarié-e-s sur les lieux de travail. Cette revendication est urgente. Elle doit devenir à la fois la condition et la conséquence d’une mobilisation large dans ce pays, permettant au salariat de pousser en avant la construction de contre-pouvoirs.
Seuls la lutte, le rapport de forces et un syndicalisme effectif nous permettront d’obtenir des conventions collectives et des accords améliorant les conditions de travail et de salaire, la protection et l’auto-détermination des travailleurs/euses, promouvant la santé, l’intégrité, la dignité, la liberté.
Il nous faut une politique populaire d’émancipation dont les objectifs et les pratiques ne sont pas enchaînées par le consensus, la participation au pouvoir d’Etat et à la paix sociale, mais se basent sur nos besoins, nos aspirations à la libération et à l’égalité sociale.
Il n’y a pas d’autre réponse réaliste à la politique de division, de hiérarchisation, de mise en concurrence des un-e-s contre les autres voulue non seulement par l’UDC mais par toute la droite bourgeoise, et avec elle par tous les groupes du système de pouvoir qui nous exploite, nous aliène et nous domine.
Rebellion-VD - Janvier 2014 (PDF)
L’UDC, cette avant-garde bourgeoise
L’UDC contre tous les autres ? Tel serait le clivage que suscite l’initiative contre l’immigration de masse. En fait, cet affrontement cache des convergences fondamentales.
La bourgeoisie, les forces politiques institutionnelles, le social-libéralisme dans toutes ses déclinaisons, l’appareil d’Etat lui-même, tout cela converge dans une défense de l’ordre dominant.
L’UDC est le partide l’avant-garde bourgeoise, le parti de lutte des classes privilégiées. Les blochériens sont plus que les alliés stratégiques de toutes les forces bourgeoises qui combattent aujourd’hui leur initiative, ils sont le détachement d’assaut du bloc social au pouvoir.
Nous ne sommes donc pas dans une situation où le clivage essentiel serait xénophobe contre anti-xénophobe, mais, bien plus fondamentalement, dans une lutte entre le régime, le dispositif du pouvoir étatique, les classes dominantes d’une part et, de l’autre, le salariat et les classes populaires, toutes celles et tous ceux qui subissent une attaque systématique contre leur condition de vie et de travail, contre leurs droits démocratiques, syndicaux, fondamentaux, aussi.
Sur la question de l’immigration, l’UDC ne cherche pas à imposer, à courte échéance, une politique alternative d’ensemble. Ses vrais objectifs sont de plus longue portée, différents. L’UDC cherche à conquérir l’hégémonie politique et culturelle dans le champ bourgeois.
Libre circulation de l’exploitation
La dégradation des conditions de travail et de salaire que provoque la politique de libre circulation de la force de travail s’inscrit dans une attaque plus générale. Il n’y a pas seulement des mesures d’accompagnement insuffisantes, contournées et souvent vidées de tout contenu. Il y a des mauvaises conventions collectives qui ne protègent pas, voire qui contribuent à réduire encore les minces acquis légaux qui peuvent demeurer ici ou là. Il y a l’offensive systé
matique pour démanteler les assurances sociales, pour faire baisser brutalement le salaire social et les protections. Il y a la consolidation d’une situation où les droits d’association, d’expression et d’action des salarié-e-s sont tout bonnement piétinés. Nous savons que dans ce pays la protestation, la critique, pour ne rien dire de la grève, mènent à la sanction et au licenciement. Il y a le démantèlement progressif du service public accompagné d’une attaque incessante, menée maintenant depuis une génération, contre les travailleurs/euses qui y œuvrent. Il y a la difficulté extrême, non seulement d’arracher un salaire minimum, mais plus largement d’imposer des salaires qui permettent de vivre décemment pour une fraction importante du salariat, infiniment plus étendu que celles et ceux qu’on nomme les working poors.
Comment s’étonner dans une telle situation générale que les mesures d’accompagnement de la libre circulation soient notoirement insuffisantes pour contenir le dumping salarial et limiter la dégradation des conditions de travail et de vie du salariat ?
Ces mesures sont tout simplement un élément de cette chaîne d’attaques, de dégradations, de mise au pas, de contrôle et souvent de répression systématiquement menée contre les salarié-e-s de ce pays.
Le marché du travail est une construction politique
Le marché du travail est une construction politique dans laquelle un large dispositif, avec au centre l’appareil d’Etat, encadre, contrôle, réprime, mobilise et assigne les divers segments du salariat afin de pouvoir assurer le commandement, accroître l’exploitation, réduire le salaire qu’il soit direct, indirect ou social. La « concurrence » entre, d’une part, travailleurs/euses suisse-sse-s et « indigènes » (comme aiment désormais à le dire les élites et les experts du système) et, d’autre part, les nouvelles vagues d’immigration, frontalières ou non, n’a rien d’un phénomène naturel. Elle est systématiquement organisée par une politique de marché du travail qui fracture le salariat, le segmente et impose une lutte de tous/toutes contre tous/toutes pour trouver un emploi et avoir un salaire.
Le système fonctionne selon une classification de plus en plus fouillée, de plus en plus « séparatiste », pour prévenir et empêcher toute possibilité de convergence et de lutte commune dans le bloc populaire. Il y a les Suisses d’origine, les Suisses de papier, les indigènes, les permis B, les frontaliers, les permis F ou L, les débouté-e-s, les rejeté-e-s, les provisoires, les sans-papiers du tout mais qui paient les assurances sociales et les impôts, les clandestin-e-s... Un sans-fin de figures ainsi classées, organisées et divisées pour pouvoir être contrôlées, commandées, réprimées, neutralisées. Pour le système, il s’agit toujours de contenir, de réduire et de détruire la force sociale et politique du salariat.
Cette fragmentation ne recoupe pas comme autrefois dans une division entre qualifié et non-qualifié. Elle traverse toute la composition du salariat, tous ses segments. Elle met en concurrence tous les éléments de la force de travail, y compris les travailleurs/euses intellectuel-le-s.
La question des travailleurs/euses sans papier est particulièrement exemplaire quand on pense le marché du travail comme une construction politique. Les clandestins sont là. Les capitalistes les emploient et les exploitent. Avec elles et eux, ce que le système vise c’est la construction d’une force de travail radicalement expropriée de droits, totalement précarisé. Les sans-papiers sont l’utopie concrète du Capital, un collectif de travailleurs/euses totalement flexible, sans rigidité aucune.
Le système de domination agit à partir de groupes sans défense pour étendre la précarité à l’ensemble des secteurs et des figures du salariat.
Ce qu’implique la négociation à froid
Les centres de pouvoir bourgeois soutiennent la libre circulation car elle permet davantage d’exploitation, davantage de flexibilité dans la gestion de la main d’œuvre, davantage de contrôle et de domination. Les quelques mesures qui sont concédées pour que la « concurrence » n’aboutisse pas à des explosions sociales ou à des dérives politiques incontrôlables, en un mot à des désordres, sont confiées à l’Etat. Elles sont aussi largement sous-traitées aux partenaires sociaux, aux forces qui soutiennent et qui gèrent la paix du travail, le syndicalisme d’accompagnement et de concertation. En un mot, aux appareils dont la fonction est de contenir et d’empêcher les luttes.
Le social-libéralisme dans toutes ces déclinaisons est au centre du dispositif de pouvoir dans ce pays. Il s’agit, certes, d’une force subalterne mais directement agissante dans la dégradation, sur tous les terrains, des conditions de travail et de vie du salariat et des classes populaires. Le social-libéralisme, quel que soit le champ particulier de son intervention (politique, syndicale, associative), agit stratégiquement pour imposer la négociation à froid, la concertation, la non-mobilisation, la non-construction du rapport de force, le non-conflit. Il « déprotège » et désarme sur tous les terrains, sur celui des droits de l’immigration comme sur tous les autres.
L’accélérateur UDC
Le projet de l’UDC est d’imposer une extraordinaire accélération, un formidable approfondissement, de la dégradation des conditions de travail et d’existence du bloc populaire. En matière d’immigration, les blochériens ne visent à revenir aux contingents qu’à titre de pure invocation. Ils reconnaissent que si leur initiative devrait être acceptée, les contingents correspondraient aux demandes de forces de travail exigées par le patronat. Le vrai objectif de l’UDC c’est de mener jusqu’à ses dernières conséquences la politique de fragmentation du salariat, son encadrement, sa mise au pas. Elle veut barrer au bloc populaire la route de son organisation indépendante et de son entrée en lutte.
En ce sens, la concertation et le compromis que le social-libéralisme entretient avec les forces de la bourgeoisie représentent pour le parti blochérien des éléments à réduire et à détruire. Mais, là aussi, les blochériens ne sont pas seuls. Tandis que le social-libéralisme accompagne et négocie (de plus en plus mal) le démantèlement progressif des conditions de vie et de travail du bloc populaire, une partie croissante des classes privilégiées est prise par la tentation d’accélérer et d’approfondir le recul qu’elle impose aux classes subalternes et aux groupes dominés.
Les ghettos, la précarité, la soumission
Dans cette dynamique, la division du salariat appelle une politique de ghettos statutaires et de précarités sociales imposées aux immigré-e-s (par exemple, les mesures d’expulsion en cas de perte de l’emploi et du salaire qui visent tous/toutes les étranger-ère-s, à l’exception des sans-papiers, plus précaires encore). La constitution d’un sujet social particulier, désigné comme source de problèmes sociaux majeurs, systématiquement soupçonné de triche, de fraude et d’abus, présenté comme responsable d’une concurrence déloyale à l’égard des salarié-e-s « nationaux » ou « indigènes », désarme le salariat en le divisant et l’empêche de constituer par son unité une force matérielle capable de changer l’ordre des choses.
La défaite de l’UDC est tactiquement importante
Une défaite imposée dans les urnes à l’initiative de l’UDC est tactiquement importante. Une victoire de l’UDC signifierait une défaite politique pour l’ensemble des expériences de lutte et de revendication dans ce pays. Mais notre combat vise l’ensemble des forces, la totalité du dispositif qui nous impose aujourd’hui une société d’exploitation, de domination, de pouvoir séparé. Donc la dégradation des conditions de vie et de travail que nous subissons.
Dans le dispositif de pouvoir, il y a aussi les appareils du social-libéralisme qui agissent directement pour empêcher la construction de la puissance du bloc populaire, son organisation, sa capacité à élaborer et à imposer des revendications, à conquérir son indépendance syndicale et politique, culturelle et sociale face au système.
Combattre les blochériens, c’est donc combattre la totalité du dispositif du pouvoir. Attaquer la concurrence de tous/toutes contre toutes/tous, c’est mettre en avant des revendications qui construisent socialement et culturellement, politiquement et syndicalement, l’unité du bloc populaire et du salariat. Changer et améliorer la vie à partir des besoins et des aspirations, protéger socialement le salariat, faire monter son organisation, voilà la démarche qu’il faut généraliser et approfondir. Quelques orientations revendicatives la matérialisent. Tout n’est pas là, ce ne sont que des exemples.
Nous serons ce que nous lutterons
Il faut accroître la capacité de résistance, de défense des droits de toutes les fractions du salariat et du bloc populaire, depuis la multiplication des procès prud’hommes aux grèves et aux manifestations, en passant par les actions plus élémentaires, les démarches collectives les plus modestes. Il faut faire monter les luttes. Il s’agit de construire les points d’appui, les outils, la communication qui permettent à un nombre croissant de gens de s’opposer aux éléments d’exploitation et d’arbitraire, aux excès systématiquement subit, à la domination. Nous devons accumuler l’organisation pour répondre à chaque injustice et pour avancer à chaque échéance.
La clé pour cela c’est la construction d’un front anticapitaliste politique, associatif et syndical, dans la pleine égalité de tous les collectifs qui conflueront sur ce projet. Mais ceci implique que nous disposions d’outils syndicaux et politiques de base, effectifs, qui organisent la lutte et la revendication, qui permettent de mener le combat, qui construisent le collectif. Syndicats indépendants, collectifs de lutte, équipes et collectifs militants menant l’action et la mobilisation dans le syndicalisme institutionnel, contre les appareils. Tout ce qui se fait doit être mis en communication et en fédération pour multiplier notre puissance. Il s’agit d’offrir un nombre croissant de points d’appui et d’outils à celles et ceux qui, en bas, veulent résister.
Quelles sont les revendications centrales ?
Sur le terrain des droits de l’immigration, les meilleures réponses ce sont les solutions qui unifient et fédèrent toutes et tous, porteuses d’amélioration et d’émancipation à égalité pour chacun-e. Cela veut dire :
Biens communs, égalité, socialisme
En conclusion, les droits et les conditions de vie des classes populaires, des majorités sociales, sont un bien commun qui doit être pensé et conquis depuis une exigence d’égalité et d’émancipation. L’UDC, les forces de la bourgeoisie, le dispositif de pouvoir, tout ce monde pense et produit de la division, de la séparation, de l’impuissance pour celles et ceux d’en bas. La défense des droits des salarié-e-s immigré-e-s passe par la défense de toutes et de tous, par des revendications qui donnent à chacun-e les mêmes droits, les mêmes conditions, les mêmes acquis et qui donc les impliquent à égalité dans une même lutte.
La défaite qu’il faut espérer écrasante de l’initiative contre l’immigration de masse n’est qu’un moment de la politique institutionnelle. C’est sur le terrain de notre force sociale, politique et syndicale, par l’action directe populaire, dans une visée d’égalité qu’il faut agir. Il s’agit de construire la force qui nous permettra d’imposer les revendications, de construire un contre-pouvoir et de faire changer ce monde de base, vers une société socialiste autogestionnaire.
Organisation Socialiste Libertaire - Vaud - Janvier 2014
Depuis le milieu des années 1980, la Loi sur l’asile n’a cessé de connaître des révisions en chaîne venant péjorer drastiquement les conditions de vie des personnes exilées. La politique d’asile est officiellement définie comme une politique « de dissuasion » à l’égard des réfugié.e.s potentiel.le.s et « de renvoi » à l’encontre de celles et ceux qui sont entré.e.s en Suisse
Dans ce contexte, les autorités cantonales et fédérales ont tout entrepris pour isoler socialement les candidat.e.s à l’asile et pour les empêcher de créer des liens en Suisse. C’est ainsi que l’on casse la solidarité...
La Suisse connaît une législation sur l’immigration restrictive, qui a fabriqué depuis des décennies des femmes et des hommes sans-papiers. La Loi sur les étrangers rend quasi-impossible un séjour légal des personnes qui n’ont pas le passeport helvétique ou ne sont pas ressortissantes de l’Union européenne. Ces personnes sont « illégalisées », transformées en « délinquants » puisque le séjour illégal est passible d’un an de prison au maximum !
La catégorie « immigré » (c’est-à-dire une catégorie inférieure et précaire) a été systématiquement construite pour conforter une différentiation dans les milieux populaires et pour pouvoir désigner les coupables et les acteurs d’un certain nombre de problèmes sociaux et politiques. Du coup, l’immigration sert à construire l’image, le concept et le symbole même de l’unité de la nation et la question « immigré » donne aux couches populaires l’illusion de pouvoir comprendre et maîtriser la source de leurs difficultés.